Si penser nous aide à prendre des décisions, à y voir plus clair et à avancer, le simple fait de (trop) penser peut devenir la source de profondes souffrances. Celles-ci peuvent nous faire douter de nous, de nos capacités, de notre stabilité mentale et peuvent nous conduire à de véritables pathologies comme le doute pathologique, les TOC, l’anxiété sociale, les attaques de panique, les phobies, les insomnies, le stress chronique…
Dans mon cabinet, je rencontre beaucoup de patients qui me disent « cogiter » tout le temps. Pour reprendre leur propos « mon cerveau ne se repose jamais ». Leur pensée prenne diverses formes :
- Les pensées du futur : « et si et si » avec souvent des scénarios catastrophiques
- Les pensées du doute : « et si j’étais un serial killer, et si j’étais un pédophile … »
- Les pensées du passé : « et pourquoi il m’a dit ça, et si j’avais dit, pensé, ou fait ça »
- Les pensées du jugement « qu’est-ce que les autres pensent de moi, et si les autres disait ça de moi, et s’ils savaient ce que je pense, ils vont me trouver nul »
Ces pensées, parfois même les plus surprenantes, tout le monde les traverse à un moment donné dans sa vie.. Alors que certaines personnes les laissent passer comme des nuages dans le ciel, d’autres s’y attardent et parfois les combinent toutes à la fois. Elles y accordent tellement de crédit que ces pensées peuvent devenir un vrai piège mental qui les tourmentent sans relâche. Leur raisonnement rationnel peut ainsi cesser d’être un mode de gestion sain et fonctionnel. Autrement dit, plutôt que de les aider à se préparer, à y voir plus clair et à avancer, leur raisonnement les conduit à interpréter, à supposer des faits, des comportements, ou encore à se projeter dans des scénarios catastrophiques en chaîne, souvent sur des problèmes anticipés. Alimentées par la peur, les pensées deviennent obsessionnelles, envahissantes, fatigantes et conduisent à de redoutables ruminations. Elles finissent par prendre tout l’espace dans notre tête comme un arbre aux multiples ramifications qui poussent et que le jardinier oublie de tailler.
Ces ruminations nous empêchent de profiter du moment présent et en même temps finissent par créer des problèmes au présent. Ainsi les patients me rapportent : « ça mouline, c’est usant, fatigant, plombant. C’est un disque rayé qui tourne en boucle, parfois plusieurs heures, des journées entières à tourner en rond. Je ne fais plus rien de mes journées, je n’arrive plus à me concentrer. J’ai peur de tout, de mon ombre. Je finis par faire des erreurs, par bégayer, par être mal, les autres le voient».
Vous l’avez compris : ces ruminations ne nous permettent pas d’avancer. Elles nous font tourner en rond comme si vous êtes sur un rondpoint ou toutes les voies de sorties sont fermées. Elles participent à la procrastination, renforcent la peur, alimentent notre anxiété, nous font douter de nous, transforment nos croyances en vérité absolu, nous enferment, nous isolent des autres et font perdre confiance en soi….etc
Elles sont combinées à des symptômes d’épuisement cognitif (erreur, oubli, perte de concentration, trouble de l’attention) et / ou physiques (courbature, trouble du sommeil, boule d’angoisse, sueur froide …) qui sont tous les conséquences des ruminations.
Libérez vous de vos ruminations, responsables de stress et d'anxiété chroniques
Il est toutefois possible de reprendre le contrôle de ses ruminations. En séance et entre les séances, je propose des exercices pour ne plus les subir et pour revenir au moment présent. Cependant, il n’est pas forcément simple d’arrêter ce processus de ruminations quand il s’est emballé depuis longtemps. Cela demande de la patience, de la discipline, de l’indulgence avec soi-même. Même quand on grimpe un sommet, il y a des moments où l’ on doit faire des pauses, progresser par pallier, prendre le temps de récupérer pour mieux reprendre l’ascension. C’est ce qui permet de garder le cap et d’atteindre le sommet. Ce n’est qu’une fois arrivé en haut que vous pourrez alors contempler l’horizon et vous sentir libéré. Les patients qui ont atteint le sommet sont plus calmes, plus détendus, plus sereins. Mais surtout, ils ont beaucoup, beaucoup, beaucoup plus de temps et d’énergie à consacrer aux activités et aux personnes qu’ils aiment.
Rumination : encore une hésitation à les réguler
Dressez la liste de toutes les conséquences négatives sur votre vie ? Puis évaluez le degré de pénibilité de ces ruminations sur votre vie quotidienne ? Sur vos relations aux autres (travail, proches, amis …) ( 0 pas pénible du tout, 10 très pénible)
Dressez la liste de tous ce que vous apportent vos ruminations dans votre vie ? Peut-être y a-t-il des bénéfices à les garder ? Evaluer le degré d’utilité de ces ruminations dans votre quotidien ? ( 0 pas d’utilité, 10 très utile)
Comparez
Visualisez vous sans les ruminations, visualisez l’espace dans votre tête libéré et demandez vous ce que vous feriez de différent par rapport à maintenant ? qu’est-ce que cela changerait dans votre vie quotidienne, dans vos actions, dans vos comportements, dans vos relations aux autres ?